L’Ancien Germain (Herman) d’Alaska, moine missionnaire sur l’île Spruce près de Kodiak, est mort le 13 décembre 1837. Il est le premier saint à avoir été officiellement canonisé dans l’Église Orthodoxe d’Amérique (1). Le jour de sa dormition forme à présent la partie centrale de la célébration liturgique de la Pâque d’Hiver pour les Chrétiens Orthodoxes vivant en Amérique du Nord.
Ô joyeuse Étoile du Nord de l’Église du Christ,
Guidant tous les hommes vers le Royaume céleste.
Ô Docteur et Apôtre de la vraie Foi
Intercesseur et défenseur des opprimés.
Joyaux de l’Église Orthodoxe en Amérique,
Bienheureux père Germain d’Alaska,
Prie le Seigneur Jésus-Christ pour le Salut de nos âmes (2).
Pour ceux qui sont familiers des actions du Seigneur dans l’Histoire, qui connaissent la Sortie d’Égypte de Son peuple, qui ont été frappés par la Parole de Dieu résonnant dans la bouche de Ses prophètes, qui ont crû à l’Évangile du Royaume de Son Verbe incarné Jésus, le fait que l’ancien Germain soit devenu le premier saint glorifié dans Son Église en Amérique n’est en rien étonnant.
Assurément, il est vraiment comme le Seigneur – Lui qui a eu Son Fils unique engendré né sur terre d’une simple femme, dans une grotte; puis cloué sur la Croix avec des bandits, hors des murs de la ville sainte; Fils dont la Résurrection a eu pour premier témoin une ancienne prostituée d’où étaient sortis 7 démons; et dont le Nom sera prêché par le plus grand des Apôtres, celui-là même qui avait auparavant été complice du meurtre du premier martyr Chrétien – oui, quelqu’un comme saint Germain, c’est bien quelqu’un comme le Seigneur, lui qui se voit élevé le premier parmi les saints de l’Église dans les nouvelles terres.
Le jeune moine Germain était ermite au monastère de Valaam, en dans la partie russifiée de la Finlande. Il fut choisit pour être membre de la première équipe missionnaire à être envoyée de Russie en Alaska. Il n’était pas ordonné. Il n’était pas de grande érudition. Il n’était pas particulièrement habile. Sa seule grâce était que c’était un saint homme, une personne de profonde Foi et de prière continue.
Germain arriva donc en Amérique avec le premier groupe de missionnaires. Lui seul survécu, vivant de longues années comme simple moine sur l’île Spruce. Il prêcha l’Évangile aux habitants. Il prit soin de leurs besoins spirituels et physiques. Il les défendit contre la cruauté des marchands Russes. Il plaida leur cause devant le trône impérial. Il fut battu et persécuté par son propre peuple pour avoir condamné leurs injustices et leurs péchés. Il s’identifia tout entier avec l’affligé et l’opprimé. Il mourut dans l’ombre, prophétisant sa glorification dans une future Église qui devrait émerger de ses propres humbles efforts et de ceux des vagues d’immigrants qui viendraient habiter sur le Continent. Et il se révéla lui-même depuis le Ciel à ceux qui, comme lui, restèrent fidèles à Dieu, y compris le grand évêque missionnaire, le prêtre veuf et “Apôtre de l’Amérique,” Saint Innocent Veniaminoff. (3)
Le Christianisme américain a désespérément besoin du témoignage de saint Germain, car la manière de vivre américaine est si radicalement opposée sous tant d’aspects à la vie de cet homme et à celle du Seigneur Jésus qu’il avait servit. Le pouvoir, les biens matériels, les profits, les plaisirs : voilà ces nombreuses choses pour lesquelles les Américains sont connus. Ce sont les buts qu’on nous enseigne à poursuivre. Ce sont les choses dans lesquelles nous nous glorifions. Et hélas, trois fois hélas, ce sont aussi les choses que nombre d’entre nous se voient recommander par nos “dirigeants religieux,” tant par leurs paroles que par leurs exemples. Mais tel n’était pas le chemin du Seigneur Jésus-Christ. Et en aucun cas ce n’est celui de Ses saints.
“Il ne faut pas accumuler de trésors sur la terre, où la rouille et les mites rongent, où les voleurs percent et dérobent. Accumulez des trésors dans le Ciel, où ne rongent ni les mites ni la rouille, où les voleurs ne percent ni ne dérobent. Car, où est ton trésor, là sera ton coeur. [..] Nul ne peut servir deux maîtres; ou bien il faut haïr l’un et aimer l’autre, ou bien se vouer à l’un et faire fi de l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon. C’est pourquoi je vous dis: Ne vous tracassez pas pour votre vie, de ce que vous mangerez (ou boirez); ni pour votre corps, de quoi vous le vêtirez. La vie n’est-elle pas plus que la nourriture, le corps plus que le vêtement? [..] Il ne faut donc pas vous tracasser en disant: Que manger? Que boire? Comment nous vêtir? Tout cela, ce sont les préoccupations des païens; mais votre Père céleste sait bien que vous en avez besoin. Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et Sa justice; et l’on vous donnera tout le reste par-dessus le marché” (Mt 6,19-21; 24-25; 31-33).
Par rapport aux normes américaines, saint Germain d’Alaska, comme le Seigneur Jésus Lui-même, était un misérable échec. Il ne s’est pas fait un nom. Il n’était pas un homme en vue. Il n’exerçait aucun pouvoir. Il n’avait pas de propriété. Il avait peu de biens matériels, si seulement il en avait. Il n’avait aucun prestige mondain. Il n’a joué aucun rôle dans les affaires humaines. Il n’a pas prit part aux plaisirs de la chair. Il ne s’est pas fait d’argent. Il est mort dans l’ombre, au milieu des exclus. Aujourd’hui cependant, plus de 100 ans après sa mort, son Icône est vénérée dans des milliers d’églises, et son nom est honoré par des millions de gens qu’il essaie, encore maintenant, d’enseigner pour leur faire parvenir au Royaume de Dieu et Sa justice, qui ont été apporté au monde par le Roi né dans une grotte et tué sur une Croix. L’exemple de cet homme est crucial pour la célébration de Noël – en particulier en Amérique.
L’Église Orthodoxe en Amérique
Appelle tout le monde à s’unir à sa louange de tes merveilleuses oeuvres,
Ô bienheureux père Germain!
Tu es parvenu au repos dans les demeures célestes grâce à tes saints labeurs.
Nous sommes émerveillés par ta vie exemplaire.
Intercède pour nous devant le Christ notre Dieu
Afin qu’Il accorde la paix à nos âmes.
Tu as donné toute ta vie à Dieu,
L’ayant aimé par dessus tout,
Ne désirant que la céleste conversation,
Tu n’oublias cependant pas d’aimer tes frères, ô saint,
priant et chantant avec eux :
Très doux Jésus, accorde-nous le Salut, à nous pécheurs. (4)
Ô bienheureux père Germain d’Alaska,
Étoile du Nord de la sainte Église du Christ,
La lumière de ta sainte vie et de tes grandes oeuvres
Guide ceux qui suivent la voie Orthodoxe.
Ensemble nous élevons la sainte Croix
Que tu as fermement plantée en Amérique.
Contemplons et glorifions tous Jésus-Christ,
Chantant Sa sainte Résurrection. (5)
1. saint Germain a été officiellement canonisé comme saint de l’Église le 9 août 1970. C’est aussi une date annuelle de fête.
2. Tropaire de la fête de saint Germain
3. John Veniaminoff était un prêtre marié qui partit comme missionnaire en Alaska en 1824. Après la mort de son épouse, il fut tonsuré moine, recevant le nom d’Innocent (Innokenti), et devint évêque. Il mourut en 1879, étant devenu métropolite de Moscou, à la tête de l’Église Orthodoxe en Russie. Il fut officiellement canonisé saint le 6 octobre 1977, qui est le jour de sa fête annuelle, en plus du 31 mars, jours de son bienheureux trépas.
4. Matines de la fête de saint Germain
5. Un second Tropaire de la fête de saint Germain
(Extrait de “The Winter Pascha” par le protopresbytre Thomas Hopko, SVS Press, 1984)